2014-09-18

La classe de neige

C'est la fameuse "rentrée littéraire" et j'ai lu pas mal d'avis très partagés sur Le Royaume d'Emmanuel Carrère. Pour résumer, ça va de "Pourquoi il n'est pas sélectionné pour le Goncourt ?" à "C'est chiant". Et des avis aussi tranchés, c'est intrigant, j'ai bien envie de lire ce livre. Mais, puisqu'il vient de sortir, et pas en poche, il faut compter une grosse vingtaine d'euros. Je vais donc noter le titre dans un coin de ma tête et patienter jusqu'à sa sortie en poche, ou aller à la bibliothèque...


Alors quand j'ai aperçu la semaine dernière chez un bouquiniste La classe de neige du même auteur en Folio à 2,50 euros, j'ai sauté sur l'occasion de découvrir Emmanuel Carrère à coût modique !



 Et je n'ai pas été déçu.

 
Le pitch : Nicolas part en classe de neige. Il est angoissé (il lui arrive de faire pipi au lit et en classe de neige avec les copains, c'est gênant) et en le déposant au chalet, son père oublie de lui laisser son sac à dos contenant ses affaires. Tout part de travers et Nicolas sent qu'il va lui arriver quelque chose de terrible, mais quoi ?


Voilà, c'est tout pour l'intrigue, je n'en dévoilerai pas plus !


J'ai beaucoup aimé la peinture de l'enfance que fait Emmanuel Carrère. Souvent, dans les livres, les films, cette période est celle de l'innocence, de la découverte émerveillée de la vie, du bonheur que l'on a oublié une fois grand. Une vision d'adulte de l'enfance en somme. Mais l'enfance est bien plus violente et dévastatrice que ça. En tout cas dans mon souvenir, elle l'est.


Une fois adultes, on a tendance à croire qu'enfants, nous étions des êtres au cerveau et à l'intelligence en chantier. Faux ! Enfants, nous avions le même cerveau que celui des adultes, et une capacité de logique et de déduction supérieure à la leur. Entraînés à longueur de journée par l'école, nous étions rompus aux techniques de raisonnement. Et, toujours grâce à l'école et au monde bienveillant des dessins animés, livres, jeux vidéos etc. nous avions également plus d'imagination qu'eux. Ce n'est pas parce qu'un enfant a moins de vocabulaire et moins de culture et de références qu'un adulte qu'il ne saisit pas les concepts et ne comprend pas ce qui l'entoure. Au contraire, il en a une vision sans filtre, non polluée par les analogies, les comparaisons à peu près.


Et l'enfance est aussi une période de découvertes et de transformations tellement violentes. J'ai l'impression qu'une fois grands, on occulte cette sauvagerie.


Emmanuel Carrère rend bien tous ces aspects. En me plongeant dans les pensées, les doutes, les désirs de Nicolas, j'ai retrouvé ce mélange d'imagination, de morbidité, de culpabilité, de rêve aussi de mon enfance. C'est sans concession, à la fois pur et impitoyable. Exactement le même esprit que l'écriture de Lars Saabye Christensen dans Beatles, qui montre l'adolescence dans sa vraie violence, débarrassée du romantisme de notre point de vue d'adulte...


2 commentaires:

Laurence a dit…

Bravo Xavier, fort joli blog que je parcours avec plaisir.
Tu pourras essayer aussi " D'autres vies que la mienne" du même auteur, assez réussi aussi, " La classe de neige" a une résonance particulière chez moi.

Xav a dit…

Merci Laurence ! Et merci du conseil que je vais suivre !