C'est la fameuse "rentrée
littéraire" et j'ai lu pas mal d'avis très partagés sur Le
Royaume d'Emmanuel Carrère. Pour résumer, ça va de
"Pourquoi il n'est pas sélectionné
pour le Goncourt ?" à "C'est chiant". Et des avis
aussi tranchés, c'est intrigant, j'ai bien envie de lire ce livre.
Mais, puisqu'il vient de sortir, et pas en poche, il faut compter une
grosse vingtaine d'euros. Je vais donc noter le titre dans un coin de
ma tête et patienter jusqu'à sa sortie en poche, ou aller à la
bibliothèque...
Alors quand j'ai aperçu la
semaine dernière chez un bouquiniste La classe de neige du
même auteur en Folio à 2,50 euros, j'ai sauté sur l'occasion de
découvrir Emmanuel Carrère à coût modique !
Le pitch : Nicolas part en classe de
neige. Il est angoissé (il lui arrive de faire pipi au lit et
en classe de neige avec les copains, c'est gênant) et en le
déposant au chalet, son père oublie de lui laisser son sac à dos
contenant ses affaires. Tout part de travers et
Nicolas sent qu'il va lui arriver quelque chose de terrible,
mais quoi ?
Voilà, c'est tout pour l'intrigue, je
n'en dévoilerai pas plus !
J'ai beaucoup aimé la peinture de
l'enfance que fait Emmanuel Carrère. Souvent, dans les livres, les
films, cette période est celle de l'innocence, de la
découverte émerveillée de la vie, du bonheur que l'on a
oublié une fois grand. Une vision
d'adulte de l'enfance en somme. Mais l'enfance est bien plus violente
et dévastatrice que ça. En tout cas dans
mon souvenir, elle l'est.
Une fois adultes, on a tendance à
croire qu'enfants, nous étions des êtres
au cerveau et à l'intelligence en chantier. Faux !
Enfants, nous avions le même cerveau que celui des adultes,
et une capacité de logique et de déduction supérieure à la leur.
Entraînés à longueur de journée par l'école, nous étions rompus
aux techniques de raisonnement. Et, toujours grâce à l'école et au
monde bienveillant des dessins animés, livres, jeux vidéos etc.
nous avions également plus d'imagination qu'eux. Ce
n'est pas parce qu'un enfant a moins de vocabulaire et moins de
culture et de références qu'un adulte qu'il ne saisit pas les
concepts et ne comprend pas ce qui l'entoure. Au contraire, il en a
une vision sans filtre, non polluée par les analogies, les
comparaisons à peu près.
Et l'enfance est aussi une période de
découvertes et de transformations tellement violentes. J'ai
l'impression qu'une fois grands, on occulte cette sauvagerie.
Emmanuel Carrère rend bien tous ces
aspects. En me plongeant dans les pensées, les doutes, les désirs
de Nicolas, j'ai retrouvé ce mélange d'imagination, de morbidité,
de culpabilité, de rêve aussi de mon enfance. C'est
sans concession, à la fois pur et impitoyable. Exactement le même
esprit que l'écriture de Lars Saabye Christensen dans Beatles, qui
montre l'adolescence dans sa vraie violence, débarrassée du
romantisme de notre point de vue d'adulte...
2 commentaires:
Bravo Xavier, fort joli blog que je parcours avec plaisir.
Tu pourras essayer aussi " D'autres vies que la mienne" du même auteur, assez réussi aussi, " La classe de neige" a une résonance particulière chez moi.
Merci Laurence ! Et merci du conseil que je vais suivre !
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