2016-05-31

Mini-viennoiseries


Hier, j'ai passé la journée en sortie scolaire avec la classe de Maternelle moyenne section dont fait partie ma fille. Les enfants m'ont adoré, ils m'ont postillonné dessus, appelé "caca de nez", gentiment tendu leurs mouchoirs dégoulinants de morve pour que je les jette à la poubelle, mais comme il n'y avait pas de poubelle proche, je les ai gardés dans ma poche, et oubliés, jusqu'à ce que j'y cherche ma clé de voiture et que sa texture moite et gluante me rappelle leur présence...

À part ça, on a fait de l'argile, du découpage, du coloriage, écrit nos prénoms, visité le Palais des Papes, écouté une histoire et couru dans l'herbe, et c'était génial. Si j'avais 2 ans de moins, je me réorienterais vers l'Éducation Nationale, vraiment !

Mais le fait marquant de la journée d'hier, c'est qu'en récupérant la grande à la sortie de la sortie scolaire pour aller chercher la petite à la crèche, exceptionnellement, je n'avais pas de goûter sous la main. Nous nous sommes donc arrêtés dans une boulangerie, et tant pis pour le combo laitage-fruit de 4 heures, exceptionnellement.

J'ai opté pour des mini-viennoiseries, ces trucs gras, mais qui ne coulent pas, qui tachent peu, dont on peut facilement ramasser les miettes dans la voiture une fois tous les 6 mois à l'aspirateur. J'en ai demandé 6 à la vendeuse. Elle m'a aussitôt fait part d'une offre flash, exceptionnelle aussi, une promotion sur les 10 mini-viennoiseries à 4 euros. J'ai accepté, demandé les trois pains au chocolat en vitrine et le reste en croissants.

C'est en passant en caisse, lorsqu'elle me tendit le sachet, qu'elle inclina la tête et baissa la voix pour me chuchoter ces quelques mots : «Je vous en ai rajoutées un peu !
– Rajouté quoi ?
– (tête encore plus basse, voix plus soufflée mais plus poussée) Des viennoiseries, je vous en ai rajoutées un peu !»

D'un léger mouvement latéral du menton, elle m'expliqua qu'elle agissait discrètement en raison de la présence à moins d'un mètre de sa collègue (et probablement supérieure hiérarchique), qui, à moins d'être sourde et aveugle, avait forcément et fatalement entendu tout l'échange, mais avait la délicatesse de faire comme si de rien n'était.

Je la remerciai en inclinant la tête et en baissant la voix, en signe de connivence, sans toutefois aller jusqu'au clin d'œil, d'une part parce qu'il aurait établi une intimité excessive à mon goût, d'autre part parce que la dernière fois, mon interlocuteur avait cru que je commençais un AVC.

Après, je me suis posé la question des motivations de cette gentille vendeuse.

Si j'avais eu 2 ans de moins, et la confiance en soi d'un professeur des écoles stagiaire, j'aurais pensé qu'elle essayait de me brancher. Mais là, entre les cernes (une journée complète d'accompagnement de sortie scolaire, sans échauffement !), les rides, ma fille à la main, mon look 1986 avec ma veste en jean... il aurait fallu qu'elle ait mauvais goût.

Autre possibilité, elle ne supporte pas son travail, ou sa patronne, ou les deux, et enfreindre le règlement en rajoutant du rab aux clients adoucit sa peine. Mais alors, les clients sortent heureux et reviennent, la patronne ne comprend pas pourquoi avec de plus en plus de clients elle ne fait pas plus de chiffre (puisque la part supplémentaire supposée des bénéfices engendrés par l'accroissement de fréquentation sont compensés par les largesses de la vendeuse), devient irascible, ce qui navre la vendeuse qui finira bientôt en dépression à force de pratiquer le yoyo émotionnel entre ses clients reconnaissants et sa patronne suspicieuse. Impossible donc, à moins qu'elle manque d'intelligence ou de prospective...

Comme je ne pveux (du verbe "pvoulvoir") pas croire que cette vendeuse ait mauvais goût, soit bête ou manque d'imagination, il ne reste plus qu'une possibilité : elle est simplement gentille.

Et je me demande alors pourquoi ça me surprend de croiser des gens gentils...

Première possibilité : devant l'accumulation de nouvelles désolantes à longueur de journaux télévisés ou pas, inconsciemment, je pense que l'être humain a développé...

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