2016-01-19

Marketing de la mort


Voilà maintenant un peu plus d'une semaine qu'on a appris la mort de David Bowie. Et comme à chaque décès de célébrité, je suis frappé par l'unanimité autour de Mr Jones. À croire qu'une fois morts, les aspérités disparaissent, les pierres d'achoppement se volatilisent. Au fond, "les morts sont tous des braves types" comme l'a bien rappelé François Morel en citant Georges Brassens vendredi dernier sur France Inter.

J'ai beaucoup aimé Bowie, mais surtout le jeune Bowie, celui de Space Oddity, d'Hunky Dory ou de Ziggy Stardust. Je n'ai jamais accroché (ou jamais compris) le Bowie 80s et décennies suivantes. Et c'est assez génial, parce si avant lundi dernier, mes goûts et dégoûts n'étaient que subjectifs, aujourd'hui, ils sont presque politiquement incorrects !

La superforce du marketing

J'avoue, ce titre est totalement plagié d'un article de blog sur le business infâme des bouteilles d'eau enplastique... Je n'ai pas pu m'empêcher, maintenant que je suis un rebelle qui n'hésite pas à critiquer l'œuvre des morts !

Mais revenons à Bowie... Au lendemain de son décès, à la suite d'un tweet de Rough Trade, le web s'est emballé en annonçant que tous les bénéfices de son dernier album seraient reversés à des associations de lutte contre le cancer. Et l'hagiographie s'est déployée : Bowie etait non seulement un génie, mais aussi un saint.


Mais si vous lisez l'anglais, le tweet de Rough Trade et les conversations en-dessous, d'une part, les bénéfices reversés ne sont pas ceux issus de la vente de Blackstar, mais de TOUS les albums de Bowie, ET juste en janvier, et UNIQUEMENT ceux vendus par Rough Trade dans l'un de leur quatre magasins ou en ligne (ce qui est déjà franchement pas mal !)

Effet de bord ou puissance marketing, le plus bizarre est que, pour le grand public, c'est Bowie qui a récolté les louanges de ce geste. Sauf qu'il n'y est pour rien... Tout ça est très bien expliqué ici.

Quoiqu'il en soit, voilà une nouvelle réconfortante, une fois morts, nous devenons tous des saints dans l'inconscient collectif (à condition d'avoir été "un peu" célèbre de notre vivant...)

Marketing de la mort ou à mort le marketing ?

Le marketing et la communication sont donc partout. Même là où ils ne devraient ni nous atteindre, ni nous toucher, ni nous influencer...

Il y a deux jours en voiture, j'ai aperçu un homme qui demandait la charité à un feu... Une femme était à côté, elle portait une couverture avec probablement dedans un enfant emmitouflé. Il faisait froid. Sur sa pancarte, au lieu du traditionnel : "silvouplé, j'ai 4 enfan, tiket resto ou monné pour mangez" il y avait juste marqué "Famille syrienne".

D'abord, soyons clairs, je ne juge pas cette famille. S'ils mendient à un carrefour, ce n'est pas par plaisir et je n'aimerais pas être à leur place. Je me pose simplement la question de l'utilité de la pancarte. S'ils ont cru bon de préciser qu'ils étaient Syriens, c'est probablement qu'ils pensaient attirer plus de sympathie et plus de dons. Je n'ai aucun moyen d'imaginer si c'est le cas ou pas, mais ça prouve l'omniprésence du marketing. Et même là, où la détresse humaine ne devrait pas être le jouet d'une communication réussie ou pas.

Nous devenons tous victimes du marketing, à notre insu, en n'étant touchés que par l'emballage, qui masque tout. Comment savoir ce qui vaut la peine si tous les messages sont brouillés par le marketing ? Ça n'a aucune importance pour le choix d'une marque de yaourts, mais quand il s'agit de vies humaines !

J'ai bien conscience de ne pas être le premier à m'en apercevoir, le web est plein de vidéos qui démontrent que les gens aident les autres en fonction de leur apparence, leur tenue, leur race. Ça ne change rien, mais c'est triste.

Pour conclure et sans rapport, voici la chanson qui me rappelle le plus Bowie... Une chanson de Marc Bolan...


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