2016-01-25

Get Back


Un texte mal écrit, mal structuré, mais spontané...

Un groupe qui fait son dernier gig, en général, ne le sait pas. D'habitude ça s'étiole progressivement. Il joue de moins en moins souvent, 5 concerts par an, puis 2, et un jour on réalise que ça fait 5 ans qu'il n'y en a pas eu. C'est fini a posteriori, sans douleur... Là, on savait que c'étaient les derniers.


Get Back est un tribute Beatles, comme il y en a beaucoup. Sauf qu'Alain, le batteur a créé le groupe il y a 32 ans. Et hier soir, c'était la dernière. Je suis rentré dans l'équipe il y a dix ans pour faire Lennon, en même temps que Nico à la guitare et Jérôme à la basse.

On a joué dans beaucoup d'endroits, devant beaucoup de monde, costumés et en perruques, "Podium style", mais comme c'était les Beatles, ça passait !

En dix ans, on a eu quelques frictions, des tensions, des engueulades même, pour des enfantillages, mais ça ne durait jamais longtemps, tous les gars avaient de bons fonds...

On a aussi eu quelques changements dans le line-up, tant du côté musical (Steph, Mika) que technique (Pat, Claude, Gérard, Jean-Pierre, Daniel...) mais ça n'a jamais changé l'esprit et l'ambiance du groupe. Quand je vous dis que tous les gars avaient de bons fonds !

Je me souviens de ma première fois avec eux. Un concert en Suisse. Départ le matin à 6h d'Avignon, arrivée 14h, balances, hôtel, beaucoup de temps pour que le trac monte et monte et monte... Et puis, on jouait pour un gros comité d'entreprise, dans une très grande salle, avec deux scènes et des écrans géants derrière qui retransmettaient les performances en direct. Vraie pression. Et tout ça pour jouer seulement 5 morceaux en un quart d'heure !

On a souvent mal joué, chanté faux, et approximatif, mais toujours avec le sourire et l'énergie et à chaque fois on avait au moins une paire de moments pendant le concert avec le frisson... La magie des Beatles.

Un paquet de souvenirs reviennent, en vrac...

Flashes

Sur scène, on parlait anglais, pour faire plus "vrai". Mais j'étais meilleur à l'écrit. Un soir, en sortie de concert, une copine m'a dit que je parlais anglais comme un Allemand... Et pourtant, à la fin des gigs les gens venaient nous demander ce que des anglais venaient faire en Provence pour jouer de la musique... Ah, les compétences linguistiques des Français...

Au tout début, on avait trois micros pour trois chanteurs. Et puis, pour faire plus "Beatles", on est passé à deux micros, le chanteur lead seul, et les deux autres sur le même micro pour les chœurs. Mais Get Back c'était aussi de gros apéros avant les gigs. Et donc des haleines chargées, même en prenant des Tictacs... Et puis, on ne maîtrise jamais vraiment ses projections salivaires. Cette configuration m'a ainsi permis de recevoir quelques litres de postillons sur le visage, dans les yeux, la bouche... et d'en projeter un peu aussi, il faut savoir donner et recevoir !

À la fin de chaque concert, nous saluions, en ligne, comme au théâtre. Et lorsque nous étions penchés en avant, toujours, Nico ou Jérôme sortaient une plaisanterie. Je peux le dire maintenant, je n'ai jamais saisi le moindre mot de ce qu'ils disaient... Trop de bruit, les oreilles saturées de deux heures de son... Mais j'ai ri à chaque fois, juste pour les intonations et l'incongruité du moment.

En parlant de blagues incompréhensibles, je n'oublierai jamais la private joke de Nico et Jérôme (ou Steph) sur certaines chansons, à certains moments précis, qui sautaient en arrière en faisant les chœurs, juste à la périphérie de mon champ visuel. Je vous l'expliquerai peut-être, un jour...

Je n'oublierai jamais non plus les retours en camion. Avec Alain qui conduisait (toujours, l'homme sans sommeil), Claude et Pat qui dormaient assis à l'avant, la nuque cassée en deux, Nico recroquevillé en chien de fusil sur un demi-siège, et Jérôme allongé par terre sous une vieille couverture qui sentait le chien mouillé. Pas toujours glamour la vie de musicien...

Et puis il y a aussi ces concerts que je n'aurais jamais joués sans faire partie de Get Back. Comme cette fois, devant 5000 mecs ivres habillés en blanc et rouge, sur la grande scène pendant la feria de Dax. Il suffisait de lever un bras en l'air pour que les 5000 devant fassent pareil. La griserie du moment... Sur le coup, je me suis vraiment pris pour une rockstar... le temps de me rappeler que j'avais une perruque sur la tête et que je faisais semblant d'être John Lennon ! Mais c'était bien quand même !

Et tellement d'autres images, tellement...

Alors oui, c'est toujours un peu triste un groupe qui meurt, mais on en a bien profité quand même. Et puis maintenant, Nico va pouvoir laisser sa moustache repousser, Jérôme et moi arrêter de nous raser la barbe et Alain se couper les cheveux !

"Every night, the tears come down from my eyes"

Hier, j'ai passé la dernière heure du concert dans un état second, joué et chanté en pilotage automatique, à la fois dans le brouillard et plein de lucidité, acteur et spectateur, j'avais vraiment envie de profiter de tout ça une dernière fois.

Pendant le rappel, sur Hey Jude, comme je ne rentre qu'au deuxième couplet, j'ai pris le temps de regarder les autres, Jérôme au piano, Nico avec la basse et Alain derrière nous, les volutes de la machine à fumée presque immobiles dans l'air devant le micro quand je le rejoins pour l'harmonie du dernier couplet. Puis la coda, la dernière, et le rappel du rappel, le vrai dernier morceau, la reprise de Sgt Pepper, avec pour la première fois les paroles qui veulent dire quelque chose. Je joue mal, nous chantons faux, j'ai des frissons, comme d'habitude, mais pas comme d'habitude...

Alors, que restera-t-il de tout ça ? Des souvenirs pour plus tard ? De l'amitié ? Est-ce qu'on se reverra pour ressasser le bon vieux temps, celui qui est toujours plus brillant après que sur le coup ? Je ne crois pas, je n'ai pas d'illusion, l'inertie est forte, même avec beaucoup de bons sentiments. Et puis on ne se voyait pas beaucoup en dehors de Get Back... Mais ça n'empêche pas, même loin des yeux, tous ces gars, avec lesquels j'ai partagé tant de moments forts, ne seront jamais très loin du cœur...

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