2015-12-02

Ô Marseille


Ah Marseille, les Marseillais, leur caractère exubérant, méridional, bonhomme, bruyant, impulsif... et tellement désorganisé et bordélique !

Mardi dernier je reçois un email de la chargée d'évènementiel de la Cité des Métiers à Marseille, m'informant de la tenue d'une réunion qui pourrait m'intéresser sur les "Métiers du digital". La réunion est prévue... le lendemain. Je goûte un instant l'ironie de la situation : métiers du digital, planification de la communication, maîtrise du calendrier. Qu'à cela ne tienne, je reporte sine die mon épilation de glabelle du mercredi et je décide de m'y rendre.

Je pars donc d'Avignon à 7h30, je roule bien jusqu'à 6km de la sortie Vieux Port, et là, bouchon. Normal, il est 8h20, les Marseillais vont travailler. Enfin, ceux des files de droite et de gauche. Parce que ceux, dont je suis, de la file du centre, prennent le temps de bien réfléchir encore à leur avenir professionnel. Me considérant comme légaliste et respectueux des règles élémentaires de civisme, je reste sagement dans ma voie, me faisant dépasser des deux côtés, couper la route à la moindre occasion par les intrus des autres files, auxquels je réplique d'un gracieux sourire et d'un amical geste de remerciement de la main.

Après 40 minutes et 200m parcourus, je perds patience et je déboite. J'avance enfin, mais j'ai des scrupules à me réinsérer dans le bouchon pour reprendre la direction du Vieux Port (mon côté légaliste), et puis ça semble toujours bouché, et puis j'ai déjà 40 minutes de retard... Alors j'opte pour un itinéraire bis et j'enclenche mon GPS !

Mais ce n'est pas l'idéal de suivre la bonne route avec le téléphone dans la main*, un œil sur la route et un œil sur l'écran, et les changements de direction indiqués avec 50m de retard par l'appli Mappy de l'iPhone. La couverture réseau à Marseille est méridionale aussi...

Quand parfois j'arrive à identifier à temps la direction adéquate, des travaux m'empêchent d'y aller (comment une ville avec autant de chantiers depuis si longtemps peut elle encore être aussi délabrée ?) et je fais un détour, puis un deuxième, puis un troisième, et, erreur ultime, je décide de me fier à mon sens de l'orientation.

Je me retrouve alors perdu dans des rues minuscules. Je progresse tant bien que mal dans un dédale de sens uniques quand j'aperçois une voiture en sens inverse (donc interdit pour elle, pour mémoire). Je m'approche... La voiture est vide, le conducteur s'est simplement garé là, il devait habiter à côté... Ô Marseille, la vie est si simple en ton sein ! Marche arrière, demi-tour, transpiration - pas à cause des manœuvres, c'est bon, j'ai la direction assistée, mais je commence à saturer...

Dans une descente, je suis alors stoppé par 2 flics, pour laisser la priorité à des camions de la fourrière. Les deux agents dressent des PV et je patiente... J'ai le temps de méditer sur la bonne nouvelle : il y a donc une brigade stationnement à Marseille. Et sur la mauvaise : vu le nombre de gens garés n'importe où, je dois avoir sous les yeux l'intégralité des effectifs.

Le premier camion fourrière charge une voiture, 15 minutes se passent, le temps de saluer les collègues, de retrouver les sangles, de discuter entre collègues, d'abaisser le monte-charge, de répondre aux collègues, d'arrimer la voiture, de blaguer avec les collègues, de remonter dans le camion, de redescendre pour dire au revoir aux collègues...

Puis je me retrouve au ralenti, toujours dans des rues étroites, derrière un deuxième camion fourrière qui sert de renfort-couverture-cordon de sécurité à l'un des fonctionnaires qui dresse les PV. On avance donc à la vitesse de 10m toutes les 3 minutes, le temps que le mec remplisse son carnet.

Quand je sors enfin de là, pas plus avancé, mon GPS est toujours à la masse, les travaux toujours en cours, j'ai une crampe à la cuisse gauche à force d'appuyer sur l'embrayage, j'aperçois un panneau indiquant l'autoroute, je m'y engage et je rentre (je suis en train de devenir impulsif et marseillais), tant pis pour la réunion, je contacterai les entreprises du numérique par email, j'y gagnerai en cohérence... Et puis la prochaine fois, pour voir Marseille, je regarderai Plus belle la vie... 

Bonus :  
Il y a quelques années, dans Marseille, je me suis trouvé contraint de rouler au ralenti derrière un stéréotype phocéen sur sa mobylette. 130 kilos sur des pneus sous-gonflés, mais au ralenti surtout parce qu'il saluait tous les gens de toutes les rues (il connaissait tout le monde, Marseille est un village...) avec de grands gestes des bras, des sourires, des exclamations sonores... Un peu dans le style de Jean-Claude Gaudin. Et soudain, le drame. Un coup de klaxon impatient d'une voiture sur sa gauche et instantanément, la transmutation : changement d'expression faciale, hyper-agressivité, toujours grands gestes des bras mais invectives sonores... Un peu Jean-Claude Gaudin en fait. Il a redémarré et 10 mètres plus loin, il avait retrouvé son sourire énorme et sa bonhomie marseillaise, avec bien entendu toujours derrière le cortège de voitures qui n'attendaient que l'instant où il dégagerait la route... Faut-il être schizophrène pour survivre à Marseille ?

*j'ai la chance de posséder un porte-iPhone à accrocher sur le tableau de bord afin de libérer les mains pour la conduite. J'ai d'ailleurs essayé de le mettre en place à l'aide de ruban adhésif double face (made in La Joliette) supportant jusqu'à 100kg... Mais les parties adhésives collent moins que les autocollants offerts dans les magazines Toupie, et l'iPhone chute. Il faut que je m'achète le numéro de décembre rapidement, et en double...


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