2007-05-10

La Traversée du Dimanche

Dimanche dernier, comme deux semaines avant, je suis allé voter, mais l'ambiance entre les deux tours avait changé. Le 22 avril, pour la première fois, j'avais ressenti une espèce d'euphorie, comme si je prenais vraiment conscience de l'importance du vote et de la chance que j'avais de m'exprimer. Plus prosaïquement, il faisait beau, les gens souriaient, j'avais les cheveux propres, n'allons pas chercher plus loin les causes de mon enthousiasme citoyen. Bref, là, le 6 mai, j'étais content d'aller voter, mais j'avais un noeud à l'estomac. L'importance du moment prenait le pas sur le sentiment de chance. Le fait que pour les deux candidats ce soit la première fois me donnait l'impression que nous allions, quoiqu'il arrive, plonger dans l'inconnu, alors qu'en y regardant de plus près, nous n'avions pas vraiment affaire à des nouveaux-venus, et encore moins en voyant leurs entourages. J'ai hésité jusque dans l'isoloir.


En fin d'après-midi, j'ai regardé les résultats sur le site de la Télévision Suisse Romande et j'ai lu les premiers commentaires des internautes, et c'est là que le noeud a commencé à se défaire et que j'ai eu la nausée... Deux extraits de mémoire : "Elle l'a bien dans le cul, la grosse Ségo, allez hop, à l'Ile de Ré !", "Vive Sarko, on va tous vous mettre au boulot, bande de petits bourges de gauche !"
Attention, je ne généralise pas, ce ne sont pas que les demeurés de droite qui sont un peu intolérants, égalité du temps de parole en face ! Sur le même site, certains osaient le parallèle Paris 2007-Berlin 1933 ou clamaient leur honte d'être français. J'ai aussi reçu quelques mails de commentateurs avisés de la vie politique qui se fendaient d'un laconique : "Ne votez pas pour le nain facho..."
Toutefois, certaines analyses plus poussées et surtout moins caricaturales annonçaient 5 années d'apocalypse, le début de la guerre civile...
Tout dans la finesse et le respect, quoi ! Ils ont un peu confondu le deuxième tour avec un PSG-OM. S'il est marrant d'être un tantinet chauvin, injuste, limite bourrin et grossier quand on parle de foot, je trouve ça un peu déplacé dans d'autres contextes (j'ai été champion universitaire 1999 de l'euphémisme au fait !)

Certains qui se vantent de parler sérieusement de politique noircissent encore le tableau en décrivant une France d'après les législatives comme une dictature avec tous les pouvoirs à droite... Comme depuis 5 ans en fait ! C'est aussi assez drôle de constater le nombre de personnes de droite, comme de gauche qui, avant les élections, menacent de partir s'installer à l'étranger si l'Autre gagne, et qui finalement restent, pour "résister" ! Je ne dois pas comprendre le second degré...

S'ils ne sont pas toujours respectés, les politiciens, souvent, nous le rendent bien. Pour preuve cette sentence magnifique d'un élu socialiste qui sortait de la réunion du PS au lendemain de la défaite et qui ressemblait à peu près à "Nous avons un mois pour créer un nouveau projet qui réponde aux aspirations des français" (moi qui croyais que le Pacte Présidentiel avait été mûrement réfléchi et correspondait à des convictions profondes). S'il est vrai que j'ai entendu cette phrase rapportée par un journaliste de i-Télé en retour d'un concert le lundi 7 mai à 3h du matin et donc dans un état de fatigue certain qui pourrait laisser un doute quant à son exactitude, elle est hélas plausible et laisse à l'oreille un son de déjà entendu et pas forcément seulement à l'oreille gauche. En général, pour faire de la politique, on propose ce que les français ont envie d'entendre, alors que personnellement, je trouverais plus crédible un candidat avec des pro et prises de positions plus fermes et qui essaye de me convaincre de la justesse de ses points de vue. Dommage pour moi...

PS (pour post-scriptum !) : Au fait, pour mes nausées, ce n'était qu'une légère indisposition gastrique comme on dit poliment, toujours rien à voir hélas avec mon enthousiasme citoyen sus-mentionné.

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