2018-09-09

Bonbons



Dans la famille, on a un petit problème de personnalités multiples qui se contredisent. Par exemple, aucun de nous 4 ne mange beaucoup de bonbons, allez 2 ou 3 par an et par personne maximum, soit une petite douzaine au total. Et pourtant, j'en achète souvent au supermarché... Du coup, nous nous retrouvons avec des stocks de bonbons Krema sur les bras.


Nous habitons une maison dont la cuisine donne sur une rue assez passante, et ma belle-mère a eu l'idée géniale de poser le bocal de bonbons sur le rebord de la fenêtre, avec un message "Servez-vous" ! Et depuis, notre stock s'écoule sûrement et doucement (pour la plupart, les gens attrapent un bonbon seulement, pour une consommation immédiate, en laissant des munitions pour les suivants), et contribue, nous l'espérons, à la convivialité de notre village et à la future installation d'un nouveau dentiste dans une rue voisine.

Parfois, je m'assois dans la cuisine avec l'ordinateur pour écrire, la fenêtre est fermée, avec un voilage, qui me permet d'être isolé, peu ou pas visible depuis l'extérieur. Par contre, j'aperçois les gens qui passent, surtout quand ils s'arrêtent pour piocher dans le bocal. Et c'est marrant.

Il y a les enfants qui n'osent pas trop, puis attrapent un bonbon au hasard et partent en courant, les ados qui gloussent en trouvant puéril de manger des sucreries ou d'en distribuer, mais qui prennent bien soin de sélectionner le parfum idoine, puis qu'on voit repasser 5 minutes plus tard pour recharger. Et puis les adultes, les plus drôles.

J'ai ainsi vu passer une mère avec ses deux garçons. L'aîné s'était arrêté devant le bocal et sa mère a commencé à l'engueuler. Elle voulait juste qu'il prenne aussi un Krema pour son frère ! Ensuite, elle lui a demandé de dire merci, ce que le garçon a fait, il a remercié la fenêtre de la cuisine.

Une autre fois, c'est une personne d'un certain âge (une vieille si on oublie le politiquement correct) qui a bloqué le panneau "Servez-vous". Elle a regardé à droite, puis à gauche, et attrapé une grosse poignée de bonbons main droite. Comme il en restait 3 ou 4 encore au fond du bocal, elle a utilisé la main gauche pour vider les réserves et est repartie tranquillement. Pour rester dans la philosophie de Rousseau et voir le bon en chacun, je pense qu'elle avait de nombreux petits-enfants à la maison, qui aiment les Krema... Ou alors c'est simplement la peur de manquer, réminiscence des temps passés, des restrictions de l'après-guerre qui l'a guidée (une femme de 70 ans aujourd'hui, donc née vers la fin des années 40 n'a pourtant pas dû connaître ou se rappeler des tickets de rationnement, nous dirons donc qu'en 1968, elle a probablement subi la propagande de la légende des chars aux portes de Paris, du coup d'état à venir, puis qu'en 1981, elle devait être persuadée que les communistes au gouvernement annonçaient l'invasion de la France par les soviétiques, d'où les angoisses sur les denrées périssables... Oui, on va dire ça...)

Bref, je n'aime toujours pas les bonbons d'un point de vue gustatif. Par contre d'un point de vue sociologique...

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