Papillon

Aujourd'hui, je suis allé à la caisse d'allocations familiales afin de récupérer les papiers à remplir pour mon changement d'adresse. J'enregistre mon arrivée sur la borne et j'attends mon tour. Après quelques minutes, un écran très poli mais peu observateur invite M. ou Mme Reusser à se présenter au Guichet A. Etant arrivé seul et célibataire, je choisis d'y aller tout de même. Je suis accueilli par une dame très gentille. Un bandeau électronique déroulant m'apprend qu'elle s'appelle Edith X. et qu'elle est technicien conseil (toujours ce petit problème de genre à la CAF). Bel exemple d'affectation des ressources financières de la CAF là où un écriteau posé sur le bureau aurait suffi, sans compter la consommation électrique, merci pour la planète !

Après exposition de mon cas, la technicien conseil lance l'impression des documents que je devrai remplir pour ma demande (9 feuillets !) avec les renseignements dont la CAF dispose déjà depuis des années et qui n'ont pas changé, comme Edith me l'a demandé une minute plus tôt, merci encore pour la Terre. (On aurait pu imprimer en recto-verso, mais 9/2=4,5 et à la CAF, ils n'ont pas de papier en A5)

Puis, Edith sort une feuille intitulée "demande de pièces" qu'elle commence à remplir à mon intention avec mon nom et mon numéro d'allocataire et qui liste les pièces que je dois leur fournir (qui ne sont autres que les feuillets susnommés remplis par mes soins, encore merci pour la Terre, fallait pas !)

Manque de chance, fatigue inopinée, stress post-traumatique dû à un éclairage trop agressif, chute de cheveux ? Les possibilités sont multiples et l'enquête interne dégagera les responsablilités mais quoiqu'il en soit Edith note mon numéro d'allocataire dans l'emplacement réservé à mon nom. Qu'à cela ne tienne, une rature, ou une permutation entre mon nom et mon numéro et tout ira bien ! Mais non, Edith prend la feuille, la laisse négligemment tomber dans sa corbeille à papier en me jetant un regard complice accompagné d'un léger gloussement un peu gras et recommence avec un nouveau feuillet. Toujours et encore merci pour la planète !

Avec l'ensemble des courriers que j'ai reçu dans ma vie de la CAF (plus nombreux qu'ils ne devraient car la CAF réexamine ma situation mois après mois, puisque je suis intermittent et que mon salaire varie par conséquent de mois en mois. Ils feraient certainement mieux de se baser sur mes revenus de l'année précédente, comme pour un allocataire "classique", mais non, pourquoi faire simple ? Du coup, un mois je touche 45 euros et le mois suivant, ils m'annoncent que j'ai trop-perçu 32 euros le mois d'avant et que mes allocations seront dorénavant de 13 euros, puis le mois suivant, finalement j'avais droit à 38 euros... bref), j'ai du causer la mort de trois arbres en Amazonie au moins. Merci pour la planète... et mon karma !

Alors c'est vrai qu'une petite feuille gâchée par-ci, une ramette de papier pour caler une armoire par là, ça n'a pas grande incidence sur l'écosystème mondial, mais chaque geste compte, les petits ruisseaux font les grandes rivières, petites causes, grands effets, et j'en passe et des meilleures !

C'est l'effet papillon (pas la chanson, pitié) ! Un battement d'aile d'un papillon au Mexique peut déclencher une tornade au Texas ! C'est prouvé, c'est mathématique ! Et puisque c'est une démonstration mathématique, l'inverse est vrai aussi ! Une tornade au Texas peut provoquer le battement d'aile d'un papillon au Brésil ! C'est moins grave certes, mais si ce battement d'aile provoque à son tour une nouvelle tornade ? On s'en fout, c'est loin le Texas...

De toutes façons, à force de consommer de l'électricité et de gâcher du papier, on va épuiser la nature, et bientôt il n'y aura plus de papillons au Brésil. Tant mieux pour le Texas ! D'ailleurs, ça ne me surprendrait pas que des intérêts pétroliers texans (Bush ?) essayent de tuer tous les papillons brésiliens en encourageant les employés de la CAF de Vaucluse à jeter des papiers... Sarkozy était aux Etats-Unis hier, il n'y a pas de coïncidence...